L’atout chanvre pour décarboner la planète – Avec Diane Masure

« Aujourd’hui, nous retrouvons le chanvre dans la construction, le textile, l’alimentation… Il a été longtemps été dénigré puis réintégré. On avait oublié tout cela et maintenant, nous devons adapter l’outil industriel à sa transformation ».

Le chanvre, Diane Masure le connaît bien. Passionnée, intarissable sur les sujets agricoles, après des années passées en Sicile et au Portugal pour son travail de consultante, en 2013 elle pose ses valises dans l’Aube pour reprendre l’exploitation des 115 hectares de la ferme familiale de son mari. Blé, orge, colza, lentilles, moutarde et autres graminées y sont cultivés. « Le chanvre est une histoire de famille, explique l’agricultrice. Nous en avons toujours cultivé et sommes complètement autonomes pour la récolte, le fauchage et le séchage. Et comme pour toutes les autres cultures, nous privilégions la proximité et les filières courtes ». Chènevis et paille partent donc vers la Chanvrière pour la transformation.

Depuis 2015, Diane Masure fait d’ailleurs partie des membres du bureau de La Chanvrière. « Je n’imaginais pas la richesse du métier d’agricultrice ». Elle organise aussi régulièrement des journées portes ouvertes de son exploitation lors des Journées Européenne du Patrimoine pour sensibiliser le grand public au rôle de l’agriculture dans la sauvegarde du patrimoine sol et biodiversité et promouvoir l’agriculture de conservation des sols. Elle anime également le réseau APAD, l’association pour la promotion d’une agriculture durable où elle est vice-présidente*.

Le 4 pour 1000 pour la sécurité alimentaire, écologique et climatique

Diane Masure s’est engagée dans l’agriculture de conservation des sols (ACS) qui s’appuie sur trois piliers complémentaires :

  • la couverture permanente du sol avec le maintien des résidus en surface et des couverts en interculture pour favoriser la structuration du sol, l’apport d’éléments organiques et favoriser la biodiversité,
  • le semis sans travail du sol pour ne pas perturber son activité biologique et favoriser la porosité,
  • la diversité de la rotation des cultures pour agir sur la complémentarité des espèces.

Diane Masure est engagée dans le projet 4 pour 1000  (issu de la Cop 21) pour la séquestration du carbone : l’augmentation du stockage du carbone dans les sols de 4 pour 1000 ou de 0,4 % chaque année permettrait de stopper la concentration de CO2 dans l’atmosphère à terme à l’échelle mondiale. L’agriculture de conservation des sols va dans ce sens et permet une augmentation de la matière organique des sols (et donc de son stock en carbone) qui va au-delà de l’objectif 4 pour 1000, tout en rendant de nombreux services écosystémiques : biodiversité, réduction des ravageurs et donc des intrants, fertilité et résilience des sols, réduction des GES émis, etc.

« Le chanvre est une super culture, explique Diane Masure. Il laisse une très bonne structure de sol, il n’y a pas d’utilisation de produits phytosanitaires. C’est aussi une culture exigeante au moment de la récolte en temps de travail et selon le débouché auquel elle se destine. L’avantage du chanvre est de pouvoir fixer le carbone dans quelque chose qui sera pérenne comme la construction où le carbone est alors capté dans un mur par exemple. En l’utilisant dans le textile, on développe une chaîne plus vertueuse que celle du coton par exemple qui nécessite des phytos ».

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Une filière globale avec l’agriculture pour point de départ

Promouvoir la culture du chanvre et créer l’écosystème qui réunit producteurs, transformateurs et industriels, c’est l’ambition du Pôle européen du chanvre où Diane Masure intervient. « Il faut absolument que l’agriculture soit représentée dans toutes les commissions. Cela permet un super brainstorming et un partage de connaissances qui rapproche le monde industriel de celui des agriculteurs. Sur une exploitation, on ne peut cultiver en moyenne que 10 % de chanvre dans une rotation. Pour augmenter les volumes et répondre aux besoins des industriels, il faut donc augmenter le nombre d’agriculteurs producteurs. Et plus on augmentera la valeur ajoutée du chanvre, plus on intéressera les agriculteurs qui bénéficieront d’une meilleure rémunération. Le Pôle européen du chanvre crée une relation de partenariat et de confiance entre les acteurs. Le marché se développe. Le chanvre a le vent en poupe. Il n’y a pas de raison que cela s’arrête ».


*L’APAD : association loi 1901 pour la promotion d’une agriculture durable existe depuis plus de 20 ans. Elle favorise l’agriculture de conservation des sols (ACS). L’association compte 1000 adhérents, professionnels de l’agriculture, fédérés en 15 associations sur le territoire national. Elle a mis en place un projet carbone qui permet aux entreprises de compenser volontairement leurs émissions. https://www.apad.asso.fr/

Le 4 pour 1000 ou comment l’agriculture peut sauver le monde en captant le carbone dans le sol https://agriculture.gouv.fr/animation-sequestration-du-carbone-comprendre-le-4-pour-1000-en-3-minutes